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Jean Collin, ancien ministre d’Etat : Trois décennies au service de la République

Jean Baptiste Collin est né le 18 octobre 1924 à Bayeux, en France. L’ancien Ministre d’État sous les régimes des Présidents Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf aura servi près de trois décennies au Sénégal avec diverses responsabilités administratives et politiques. Conformément à ses dernières volontés, il fut inhumé, le 23 octobre 1993, au village de Ndiaffate dans la région de Kaolack, auprès de ses beaux-parents. 

Secrétaire général de la Présidence de la République, c’est le dernier poste occupé par l’ancien Ministre d’État Jean Baptiste Collin. C’était au début des années 90. Reconnu comme un grand commis de l’État, Jean Collin, après des études primaires à Paris de 1930 à 1935, entra au célèbre lycée Louis-le-Grand (1935-1943). Puis, c’est la faculté de Droit et ensuite l’École nationale de la France d’Outre-mer (Enfom) et l’École nationale des langues orientales. Sorti de ces grandes écoles d’alors, il débuta sa carrière en Afrique et plus particulièrement au Sénégal où il servit au Secrétariat du Haut-commissaire de 1946 à 1947. Il sera nommé chef de la subdivision de la Ville de Diourbel au centre du pays en 1947. Ce ne sera qu’un court passage car il sera nommé la même année chef du service de l’information et directeur de Radio Dakar, actuelle Radio Sénégal. Bien que n’étant pas de religion musulmane, Jean Collin sera le premier Commissaire du Gouvernement pour le pèlerinage à La Mecque. C’était en 1949. Plus tard, il sera chargé de mission auprès de Jean Letourneau alors ministre de la France d’Outre-mer. Le Cameroun en Afrique centrale l’accueille comme chef de région de 1951 à 1954. Dans ce pays, il eut de nombreuses responsabilités dont celles de chef du bureau par intérim des affaires politiques en 1955 puis de directeur du secteur de la modernisation rurale du nord du pays en 1956.

Retour au Sénégal

Revenu au Sénégal, Jean Baptiste Collin occupa le poste de chef de la subdivision de Rufisque ancienne appellation du département (préfet) et d’adjoint au chef de la région du Cap-Vert du 3 mars au 1er décembre 1960 puis gouverneur du Cap-Vert. Il a aussi servi comme Directeur de cabinet de Mamadou Dia, Président du Conseil du Gouvernement de 1957 à 1958. Par décret du 21 juin 1961, Monsieur Collin est nommé Secrétaire général du Gouvernement cumulativement avec ses fonctions de secrétaire permanent du Conseil supérieur de la défense. Commissaire du Gouvernement auprès de la Cour suprême, il obtint la nationalité sénégalaise. Après les événements de 1962 entre Dia et Senghor, il occupa le stratégique poste de Secrétaire général de la Présidence de la République de décembre 1963 à février 1964. C’est au cours du remaniement du 8 février 1964 qu’il retrouva le poste de Ministre des Finances qu’il quitta en avril 1971 pour le département de l’Intérieur (10 avril 1971 à mars 1975). Il sera élevé au rang de Ministre d’État chargé de l’Intérieur du 26 mars 1975 au 2 janvier 1981.

Père de la Réforme de 1972

Ministre de l’Intérieur, celui qui fut maire de Joal-Fadiouth de 1968 à 1972 et président du Conseil municipal de Thiès le 8 décembre 1972, aura marqué la première réforme de l’administration territoriale de 1972. C’est ainsi qu’il présenta un rapport au conseil national de l’Union progressiste sénégalais (Ups) sous la Président de Léopold Sédar Senghor pour expliquer ce qui était attendu.

Même si certains responsables socialistes étaient très critiques à l’endroit du Ministre d’État pour sa main mise sur le parti au pouvoir, pour d’autres il fut un homme de rigueur, un travailleur infatigable. Au sein du Ps, lorsque les instances furent gelées par le Secrétaire général d’alors, le Président Abdou Diouf, le groupe restreint ou Bureau exécutif mis en place fut contrôlé par l’ancien secrétaire aux conflits que l’on reprocherait de mettre ses hommes dans certaines bases du parti au pouvoir. C’est ainsi que naissaient les mouvements de soutien dont le plus en vue était l’association des amis de Jean Collin, sous la direction d’Aïda Diongue.

Pour l’ancien directeur des Archives nationales, Babacar Ndiaye, actuellement à la retraite, l’ancien Ministre d’État fut un homme qui croyait au travail et à ceux qui travaillaient. Il se souvient de sa première rencontre avec Jean Collin alors qu’il était adjoint chef de service au bâtiment annexe des Archives nationales à quelques mètres du Building administratif. « J’étais dans mon bureau une matinée et j’aperçus quelqu’un à travers la vitre. Aussitôt il frappa, je me levais et il me dit « restez assis ». C’était la première fois que je voyais la personne. Habillé en ensemble saharien kaki avec quatre poches, il était accompagné de quatre collaborateurs avec chacun un carnet à la main. Je lui ouvris la salle des archives et il fit un tour avec moi, me questionnant sur le bâtiment d’à côté où logeait le directeur. Après ce passage, il retourna jusqu’au Palais à pieds ». Il poursuit : « Même s’il a un passé colonial, il faut reconnaître que Jean Collin fut un exemple et l’un des meilleurs de notre administration ».

Un légaliste jusqu’au bout

Ancien membre du Gouvernement, Mbaye Diouf a longtemps cheminé avec le Ministre d’État qui l’avait mis à ses côtés au poste de Directeur de cabinet. Cet ancien administrateur civil et proche collaborateur confirme qu’il fut un grand travailleur au service du pays. « Je vous donne un exemple, M. Collin était à son bureau tous les jours à 7 heures et ne le quittait qu’à 20 heures », souligne l’ancien collaborateur direct. Il révèle que lorsque le Ministre d’État était en mission à l’étranger pour une semaine, il lui demandait d’envoyer le courrier à son intérimaire mais qu’une bonne partie était sur son bureau. Il précise : « Dès qu’il revenait de voyage, tous les dossiers étaient signés ou annotés en quelques heures et transmis à qui de droit. Il fut aussi très endurant car il pouvait prendre part à une réunion toute une matinée sans montrer un signe de fatigue ou d’énervement ».

Selon Mbaye Diouf, le Ministre d’État était trop légaliste quand il devait agir sur un dossier. Il se référait très souvent, souligne-t-il, aux décrets ou la loi avant de prendre tout acte administratif. M. Diouf qui était aux côtés de Jean Baptiste Collin depuis son jeune âge, indique qu’à l’époque de la machine à écrire lorsque le Ministre d’État lui remettait un manuscrit, c’était impossible d’y trouver une seule faute.

El. H. Abdoulaye THIAM LE SOLEIL

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