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CHRONIQUE : La plaidoirie de Ibn Bachir NDAO. Et si notre assemblée nationale serait le reflet de nos hommes politiques ?

 

Et si notre assemblée nationale serait le reflet de nos hommes politiques ?
Notre assemblée est trop caricaturale. Nous osons dire qu’elle est le reflet de nos hommes politiques. Notre hémicycle est loin d’être à la hauteur des attentes des Sénégalais, alors qu’elle devait être une représentation du peuple. Malheureusement, elle est le miroir de nos hommes politiques, déformant nos réalités sociopolitiques, culturelles, au point qu’elle interpelle l’opinion publique.
Qu’est-ce qui crée une telle déformation ? Détournement de missions et/ou de fonctions ? Nous savons tous que l’assemblée nationale doit être au cœur de notre démocratie. Elle forme avec le Sénat le pouvoir législatif dont la mission est faire voter la loi et de contrôler le gouvernement, et non le service à des fins politiciennes. Cette institution qui devait être celle des hommes de valeurs, de loyauté, d’intégrité, de patriotisme et de dévouement pour les causes socio-économiques, politiques : modernisation de la procédure législative, approfondissement des pouvoirs de contrôle, octroi de droits spécifiques aux groupes d’opposition, renforcement des règles de transparence et de déontologie. Interrogeons, d’ailleurs, les Article 60 et 61. Que disent-ils ?
Article 60 :
Article premier de la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 05 avril 2016 portant révision de la Constitution (JORS, numéro spécial 6926 du 07 avril 2016, p. 505), article modifiant et remplaçant l’article 60. « Tout député qui démissionne de son parti en cours de législature est automatiquement déchu de son mandat. Il est remplacé dans les conditions déterminées par une loi organique ».
Article 61 :
Article 10 de la loi constitutionnelle n° 2007-06 du 12 février 2007 créant un Sénat (JORS du 10 mars 2007, p. 2387), article donnant une nouvelle rédaction à l’article 61.
Article 2 de la loi constitutionnelle n° 2012-16 du 28 septembre 2012 portant révision de la Constitution (JORS, numéro spécial 6688 du 28 septembre 2012 p. 1187), article substituant les mots « de l’Assemblée nationale » aux mots « du Parlement ».
Aucun membre « de l’Assemblée nationale » ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions.
Aucun membre « de l’Assemblée nationale » ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’assemblée dont il fait partie.
Le membre « de l’Assemblée nationale » ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’assemblée dont il fait partie, sauf en cas de crime ou de délit flagrant tel que prévu par l’alinéa précédent ou de condamnation pénale définitive.
La poursuite d’un membre « de l’Assemblée nationale » ou sa détention du fait de cette poursuite est suspendue si l’assemblée dont il fait partie le requiert.
Le membre « de l’Assemblée nationale » qui fait l’objet d’une condamnation pénale définitive est radié de la liste des parlementaires sur demande du Ministre de la Justice.
Source : http://www.sec.gouv.sn/lois-et-reglements/constitution-du-sénégal

De tels privilèges demandent une personnalité, un charisme, pour ne citer que ces derniers. Et nos députés dans tout cela ? Evidemment rien ! De nada ! Honteux notre hémicycle semble à un « tamis grillage » ! Député trafiquant de faux billets. Députés présumé violeur. Député insulteur public, entre autres. Ainsi, que devient notre parlement, en tant que institution nationale ? Quel est le rôle de nos parlementaires ? Le député a pour rôle de contrôleur des actions gouvernementales, il le fait en séance publique, mais aussi au sein des organes parlementaires, et notamment les commissions permanentes. Toutefois, nos actuels députés ne sont à l’assemblée que pour amuser la galerie.
Que doivent être leurs relations ? En tout état de cause, à l’origine, les relations entre élus constituaient un domaine dans lequel la marge de manœuvre était limitée. Notre assemblée est progressivement transformée à un terrain de campagne électorale. A l’hémicycle, nous avons l’impression d’être toujours en période de campagne électorale ; en regardant nos députés plaider, nous appréhendons leur manque de foi et de moralité. Nous voyons des élus téléguidés par les ambitions de leur mentor respectif. Si à l’assemblée nationale, les uns parlent pour se faire plaisir ou faire plaisir à leur chef, les autres s’abstiennent par ignorance des textes et se contentent de lever la main, à chaque fois que le président de l’institution demande qui votent « pour » ou « contre ».
Par ailleurs, nous pensons que notre assemblée aurait gagné à représenter le plus fidèlement possible, malgré les enjeux politiques, le peuple sénégalais. Ainsi, les guerres de positionnement ou querelles politiques politiciennes, au quotidien, vont disparaître à l’hémicycle, laissant la place à une image noble de notre représentation nationale. Mais, notre système politique n’est pas bien structuré, il induit lui-même des logiques qui favorisent la loyauté au maître du jeu politique et ce dernier a le pouvoir de manipuler la majorité parlementaire.
Le manque de démocratie au sein de certains partis politiques, qui loin d’être des écoles pour la formation de leurs militants, par exemple, fait obstacle à celles et ceux qui ne répondent pas aux vœux des chefs de partis. De ce fait, certains partis politiques présentent des candidates et candidats qui risqueraient de choquer le public par leur comportement, paroles et actes, au sein et en dehors de l’hémicycle même, alors que de tels comportements ne sont pas dignes de leur honorabilité et rang, mais surtout aux yeux de la future génération, l’avenir de demain. La vie publique sénégalaise paraît très cloisonnée, entre les députés de la majorité et ceux de l’opposition ou bien les non-alignés. Les pessimistes restent persuadés et nous diront que notre cris de cœur ne serait jamais tenu en compte dans ce pays où « le mien prime et primera largement sur le nôtre ». Les élus trompeurs et manupileurs ne céderont pas, ni à la compétence, encore moins à la transparence. C’est triste et écœurant !
Cependant, nous leur disons aussi qu’il n’est toujours pas trop tard de bien et mieux faire. A l’heure actuelle, notre assemblée a besoin fortement d’avoir une vie citoyenne qui permettrait le croisement d’une Synergie d’actions pour faire face aux défis qui l’attendent, dans l’intérêt général. De plus, l’idée d’une représentation miroir des différentes composantes sociopolitiques du peuple à l’assemblée nationale doit être celle des Sénégalais, sans aucune discrimination. Néanmoins, il est notoire que l’assemblée nationale soit le lieu de valider les résultats des calculs des jeux politiques.
Notre malheur est que l’assemblée nationale accueille des députés qui peuvent être des femmes ou des hommes, sortis de nulle part, sans qualification, ni compétences requises pour nous représenter. L’heure a-t-elle sonné pour changer les critères d’éligibilité ? Pour redorer l’image de notre hémicycle ? Pour faire bouger la situation, faudrait-il en passer par des biais, d’abord, de l’instruction ? Car, un député doit savoir lire et interpréter un projet de lois. Comment parvenir à une assemblée nationale du peuple pour le peuple ? La solution la plus efficace nous paraît être : l’abolition de la politique politicienne au sein de l’hémicycle ; l’élection de députés responsables, dévoués pour ceux qu’ils représentent, des députés qui réfléchissent sur les questions sur lesquelles, ils sont interpellés par le Gouvernement, dont l’assemblée est l’organe de contrôle.
Nous devons revoir aussi le mode de scrutin, les pratiques ancestrales néfastes, comme le clientélisme politique qui amène beaucoup de députés ignorants à l’assemblée. Sinon, nous souffrons toujours de leur ignorance, leur incapacité, etc. Ceci étant réussi, nous pourrons, par exemple, accorder à nos députés plus de crédibilité encore, leur faire confiance, etc. à chaque qu’ils soient appelés à se pencher sur un sujet. Cela leur permettrait de représenter dignement les paysan, les enseignants, les pêcheurs, les ouvriers, les hommes, les femmes, le peuple, de manière générale. Cela permettrait aussi d’enrayer le processus d’instrumentation de l’hémicycle.

Chroniqueur : Ibn Bachir NDAO, professeur de Lettres Modernes au Lycée de Vélingara Ferlo

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